Bruguières, église et château

Bruguières, Pays Toulousain, Languedoc

Le château de Bruguières (Bruguières, 31), village de la banlieue nord de Toulouse, date de la moitié du 17e siècle. Composé d’un grand logis et d’une tour haute rehaussée d’une tourelle d’angle, il accueille maintenant un restaurant, bien en vue sur la grande place du bourg.

L’héraldiste sera attiré en particulier par une série de six arquebusières, quatre moulées en terre-cuite et deux taillées dans le calcaire. Ces décors ponctuent le mur de briques rouges des façades nord et est de l’édifice où se trouvent la tour et le portail.

Une autre arquebusière du même modèle de calcaire est conservée dans l’église paroissiale voisine.

Y son représentées les armoiries, assemblées dans un mi-parti, de deux familles patriciennes de Toulouse : la famille d’Olive et celle des Dufaur de Saint-Jory. Les écus peuvent être blasonnés « mi-parti de gueules à tois bandes d’or (qui est d’Olive) et d’azur à deux fasces d’or accompagnées de six besants d’argent (alias d’or) 3 en chef et 3 en pointe (qui est de Dufaur) ».

La famille Dufaur, originaire d’Armagnac, acquit à partir du début du 16e siècle plusieurs seigneuries autour de Toulouse jusqu’à devenir un des lignages les plus puissants de la contrée (voir notre article sur Saint-Jory).

Le 24 avril 1561, Michel Dufaur, juge-mage à Toulouse et déjà seigneur de Saint-Jory, acheta pour 700 livres la juridiction de Bruguières à Antoine Gavelon.

En 1575, cette seigneurie échut à Pierre Dufaur, un des fils de Michel et d’Eléonore de Bernuy.

A son tour, Pierre Dufaur eut un fils unique, Jacques, qui épousa Claude de Cardaillac-Bioule. C’est leur fille, Marie-Louise, qui fit entrer la seigneurie de Bruguières dans les domaines de la famille d’Olive au moment de son mariage avec Georges d’Olive en 1638.

La famille d’Olive tenait déjà des parts de la directe de cette seigneurie depuis au moins 1604, mais ils devinrent rapidement après cette union les seigneurs exclusifs de cette localité.

Un des écus, visible sur le portail du château, est dominé par la date de 1657. A cette époque, le seigneur de Bruguières est Georges d’Olive, le mari de Marie-Louise Dufaur. Il est conseiller au Parlement de Toulouse et homme de négoce, nommé capitoul de Toulouse en 1647 et 1661. C’est donc lui qui fit bâtir le château autour de cette date.

Ainsi s’explique la présence dans le même écu des armoiries de la famille d’Olive « de gueules à trois bandes d’or » et celles du lignage des Dufaur « d’azur à deux fasces d’or accompagnées de six besants d’argent, trois en chef et trois en pointe ».

Les armes mi-parties de Georges d’Olive et de Marie-Louise Dufaur se retrouvent sur un vieux plan de Bruguières établi vers 1686 et dont on peut observer un facsimilé conservé dans une chapelle de l’église Notre-Dame. Elles sont ici rehaussées d’un heaume sans cimier ni lambrequin.

Elles apparaissent aussi au frontispice dessiné pour la dédicace aux capitouls de Toulouse de l’ouvrage « Pharmacopoea tolosana » de Pons-François Purpan, publié en 1648 et consultable sur https://tolosana.univ-toulouse.fr/notice/069473013 .

Mais ici, les armoiries des Dufaur sont différentes au niveau du blasonnement des fasces notamment. En effet, si nous suivons le code des rayures, l’écu ovale dessiné là porte « mi-parti de gueules à trois bandes d’or qui est d’Olive et d’azur à une fasce d’or entre deux fasces cousues de gueules, accompagnées de six anneaux d’argent, trois rangés en fasce en chef et trois en pointe posés 2 et 1 ».

C’est le seul écu contemporain de Georges d’Olive où les émaux son représentés. Le fait que les fasces et les besants des Dufaur apparaissent modifiés par rapport aux armes traditionnelles du lignage pourrait indiquer l’adoption d’une brisure par Marie-Louise Dufaur. Mais, outre que la brisure féminine soit rarissime, le changement des besants en anneaux et le fait inhabituel que les fasces de gueules soient cousues sur le champ d’azur nous fait plutôt pencher pour une version erronée due à une mauvaise connaissance de ces armes par le graveur.

Georges d’Olive et Marie-Louise Dufaur eurent au moins six enfants mais seuls leurs trois fils sont bien connus. L’aîné, François, naquit en 1645 et hérita de la seigneurie de Bruguières. Ses armes apparaissent dans l’Armorial Général de France, dans le volule XIV, Languedoc I, à la page 445.

Son frère, Jean d’Olive de Saint-Sauveur (Saint-Sauveur, 31) fut lieutenant-colonel du régiment de Languedoc, Conseiller du roi et Substitut du Procureur Général au Parlement de Toulouse. Il mourut en 1702. Ses armes furent aussi enregistrées dans l’AGF dans le volume XIV, Languedoc I, à la page 463.

Leur dernier fils, connu sous le nom du « Chevalier d’Olive », fut commandant au régiment de Languedoc et lieutenant du Roi à Montlouis (Montlouis, 66) et il mourut en 1730.

La famille d’Olive tint la seigneurie de Bruguières jusqu’à 1713 quand François d’Olive mourut. La fille unique qu’il eut de son mariage avec Dorothée de Mauremont-Saint-Félix, appelée Marie-Anne d’Olive, se maria avec François Brandoin de Balaguier de Beaufort. Leur descendance conserva le domaine de Bruguières jusqu’à la Révolution Française.

C’est donc entre 1604 et 1713 que le chœur de l’église du village fut vouté comme l’atteste la présence d’un écu aux armes d’Olive à la clé de voute. Si l’écu est lisse, il est peint aux armes de la famille d’Olive. On peut penser que cette peinture, restaurée au 20e siècle, a repris les couleurs d’origine.

Pour conclure, nous signalerons que la commune de Bruguières a aussi conservé dans son blason municipal les armes de la famille d’Olive écartelées avec une croix occitane d’or sur champ d’azur (voir l’article « La croix de Toulouse dans l’héraldique institutionnelle).

Bandeau armorié sur le site officiel de la commune http://www.mairie-bruguieres.fr/index.aspx

Bibliographie : A.Escudier Monographie de Bruguières – canton de Fronton, Toulouse, 1935, p.7-10 ; R.Bourse e I.Dufis, Armorial des capitouls.

Olivier Daillut-Calvignac

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