Saint-Jory, Pays Toulousain, Languedoc
Le village de Saint-Jory (31), dans la plaine de la Garonne, marquait une première étape sur la route de Montauban à quelques kilomètres au nord de Toulouse. Situé entre les deux grandes forêts médiévales de Lespinasse et de Grand-Selve, un château y contrôlait un péage comtal. Une part de la seigneurie directe appartenait au 12e siècle au lignage assez turbulent des Bérenger, connu par ses conflits avec les autorités ecclésiastiques à propos des nombreuses églises qu’ils avaient usurpées.
Au début du 13e siècle, ce fief passa à la famille d’Alfaro. En effet, en 1209, le comte Raimond VI donna à sa fille naturelle Guillemette, épouse de son sénéchal Hugues d’Alfaro, les seigneuries de Saint-Jory et de Montlaur en Lauraguais. Leur fils, Raimond d’Alfaro, fut à son tour sénéchal d’Agenais et bayle d’Avignonet pour son oncle Raimond VII. C’est lui qui laissa entrer dans le château d’Avignonet, le commando descendu de Montségur pour tuer les Inquisiteurs, le 28 mai 1242. Le fils de Raimond, Hugues d’Alfaro, qui fut viguier de Toulouse, hérita des deux seigneuries. Après lui, le château de Montlaur passa au chevalier Odet de Mauriac et celui de Saint-Jory échut à un neveu nommé Bertrand d’Alfaro qui vivait encore en 1301.
Le chanoine Contrasty, auteur d’une monographie de qualité sur Saint-Jory1, donne à Raymond d’Alfaro un écu chargé de trois jumelles en bande, mais malheureusement il n’en donne pas la source.
C’est peut-être une fille de Bertrand qui fit entrer par mariage la seigneurie de Saint-Jory dans la famille de Nogaret. Les membres de cette famille bourgeoise toulousaine furent seigneurs principaux de Saint-Jory entre 1306 et 1441. Ils donnèrent aussi à la grande cité plusieurs capitouls comme Jacques (1366 et 1385), Etienne (1371), un autre Etienne de Nogaret (1435) et Pierre de Nogaret (1440) dont nous trouvons les portraits dans le manuscrit des « Annales de la Ville de Toulouse »2.
Selon ce précieux document, Pierre de Nogaret, trésorier de la cité portait en 1412 « écartelé d’or au noyer de sinople, au chef de gueules chargé d’une croix pattée et alésée d’argent ; et losangé de gueules et d’hermine » comme un autre Pierre de Nogaret (peut-être son fils), capitoul en 1440.
Quant à Etienne de Nogaret, capitoul en 1435, il portait simplement « d’or au noyer de sinople, au chef de gueules chargé d’une croix pattée et alésée d’argent » qui semblent représenter les armoiries originelles du lignage.
L’église de Saint-Jory, rebâtie entre 1527 et 1596 intéressera en particulier l’héraldiste par ses peintures intérieures. En effet, dans la chapelle jointe au côté méridional du chœur, au-dessus de scènes bibliques, nous pouvons voir un ensemble de trois litres funéraires qui nous permet de suivre les destinées de la seigneurie du lieu pendant plus d’un siècle.
En 1441, Astrugue de Court, veuve d’Etienne de Nogaret, vendit la partie principale du domaine de Saint-Jory à Pierre-Jean de Villeneuve, alias de la Garrigue, bourgeois de Toulouse. Pierre-Jean reçut le serment de ses vassaux le 9 décembre 1441 comme seigneur haut-justicier et seigneur majoritaire de la directe. Il était membre d’une autre famille capitulaire attestée depuis le 13e siècle et qui aurait primitivement « d’azur au chêne de sinople », puis à partir du 17e siècle au moins « d’azur au chêne terrassé d’or, le tronc chargé d’un croissant d’argent, accompagné de deux étoiles d’or ».
Ses héritiers se partagèrent la seigneurie comme nous le voyons dans un acte qui énonce « Sapian tous qui lo present escrieut veyran, que l’an que on compta 1466, del mes de septembre, entre nos Pey Ramon de Villanova alias de la Garrigia, Arnault Raymond et Jehan tous tres frayres, filz et heretiers per egualz partz del noble Jehan de Villenova alias de la Garrigua et del voler et consentement de la noble Almanda molhe e relicta deldit Pe Johan nostre mayre…« 3.
Françoise de La Garrigue, fille et héritière de Pierre-Raimond l’ainé, épousa vers 1489, Odet de Mauriac, descendant du seigneur de Montlaur rencontré plus haut. A sa mort vers 1509, le domaine des La Garrigue passa donc aux Mauriac qui devinrent alors seigneurs dominants de Saint-Jory et Montlaur4, reconstituant ainsi le domaine comtal donné en dot à Guillemette de Toulouse.
Ce sont les armoiries d’un membre de cette famille de Mauriac que nous trouvons représentées sept fois sur la litre supérieure qui fait le tour de la chapelle. Cette litre est la plus travaillée et les écus sont entourés d’un ensemble de feuillages ornementaux. Les écus en forme de médaille portent ce que nous pensons être un « mi-parti de ( ?) au lion contourné d’or et d’azur à un dextrochère d’argent mouvant du flanc senestre vêtu de gueules et tenant deux clés d’or ». En effet, nous préférons parler de mi-parti car nous allons voir que seule la partie senestre présente les armoiries des Mauriac.
En1369, le chevalier Germain de Mauriac, seigneur de Montlaur, scellait d’un écu présentant un dextrochère tenant fermement deux clés de grande taille (AN, Coll. Clairembault, n°5915). Une matrice différente du même personnage intitulé « réformateur général de la sénéchaussée de Beaucaire et Nîmes, commissaire du Duc d’Anjou » en 1369, est donnée par M. Oudot de Dainville parmi les sceaux conservés aux archives de Montpellier5. Ces sceaux nous montrent aussi le cimier du heaume orné d’une tête de licorne.
Le chevalier Germain de Mauriac fut aussi capitoul de Toulouse pour l’année 1371. Son portrait et ses armoiries se trouvent sur un feuillet des Annales de Toulouse conservé aujourd’hui à la Pierpont Morgan Library de New-York6. Elles peuvent se blasonner « d’azur au dextrochère d’argent mouvant du flanc senestre vêtu de gueules et tenant deux clés d’or ».
Nous voyons donc qu’il n’y a pas trace du lion contourné présent sur la litre de Saint-Jory dans les représentations plus anciennes des armoiries des Mauriac. Cet élément doit donc être probablement considéré comme les armes d’une famille alliée associées à celles de Mauriac dans un écu mi-parti. Les trop rares données généalogiques sur ce dernier lignage et la fréquence du lion en héraldique ne nous permettent pas de rattacher ce lion à une famille en particulier.
Le lignage de Mauriac va rester à Saint-Jory jusqu’à la moitié du 16e siècle7.
Mais la forme ovale de notre écu le rattache plus à la mode de la fin du 17e siècle ou du 18e siècle. Nous pouvons émettre l’hypothèse que la famille de Mauriac ait pu conserver des droits seigneuriaux malgré l’abandon du domaine éminent. Le « mille-feuille » féodal de l’époque pourrait facilement expliquer une telle situation.
A la suite des Mauriac, entre 1550 et 1560, une famille gasconne en pleine ascension va, peu à peu, acquérir la majorité des parts de la seigneurie comme les litres suivantes en conservent le souvenir.
En effet, en dessous de l’écu des Mauriac de Montlaur, nous pouvons observer une seconde litre moins ornée qui porte six fois l’écu de la famille Du Faur qui portait « d’azur à deux fasces d’or accompagnées de six besants d’argent, 3 en chef et 3 en pointe ». Ici, l’écu sommé d’un heaume emplumé porte « d’or à deux fasces d’azur accompagnées de six besants d’argent, 3 en chef et 3 en pointe ». Cette inversion de couleurs est-elle due à une brisure contrevenant aux règles du blason ou à l’altération des pigments de la peinture murale ? La seconde hypothèse nous semble à retenir.
Nous avions déjà rencontré le lignage des Du Faur dans le village voisin de Bruguières où une fille Du Faur avait épousé Georges d’Olive, seigneur bâtisseur du château de cette localité au milieu du 17e siècle 8. La famille Du Faur, originaire d’Armagnac, s’installa dans la région toulousaine à la fin du 15e siècle et rapidement contrôla un certain nombre de villages de la banlieue nord-ouest de la cité (Pibrac, Saint-Jory, Bruguières, Bouloc, Cépet…).
Pour suivre la destinée de cette famille, nous vous proposons de vous aider du tableau généalogique ci-dessous.
Au début du 16e siècle, le lignage se partagea en deux branches, l’ainée gardant les domaines dépendants de Pibrac et la cadette s’installant à Saint-Jory. Ainsi, nous trouvons au milieu du 16e siècle Michel Du Faur, seigneur de Saint-Jory. C’est lui qui étendit le domaine dans les années 1550 en achetant la majeure partie de la coseigneurie aux héritiers des Mauriac, La Garrigue etc… Il fut Juge-Mage de Toulouse, Conseiller au Grand-Conseil, Président du Parlement de Toulouse et chancelier de Catherine, infante du Portugal. Il épousa Aliénor de Bernuy et fit ajouter à son château de Saint-Jory plusieurs ouvrages dessinés par le grand architecte Nicolas Bachelier.
Leur fils Pierre Du Faur de Saint-Jory, est connu pour avoir été un des esprits les plus cultivés de son temps. Conseiller au Grand Conseil en 1558, Maître des Requêtes en 1565, Président du Parlement de Toulouse en 1575, il mourut d’une crise d’apoplexie en plein parlement pendant qu’il prononçait un arrêt le 18 mai 1600. On peut encore voir le buste sculpté de ce personnage au Capitole de Toulouse et Contrasty en donne un portrait dans son ouvrage (p.126), tiré d’une collection particulière.
Son fils Jacques II, lui aussi Conseiller au Parlement, épousa en 1599 Claude de Cardaillac, fille d’Hector, seigneur de Bioule en Quercy. Sa vie s’acheva tragiquement le 31 juillet 1616 dans l’effondrement de la chapelle des Carmélites, proche de Saint Sernin, où Jacques était en train de faire sa prière. C’est probablement pour lui que cette litre fut peinte avec son écu réhaussé d’un heaume à lambrequins.
En effet, ce sont les armes de sa veuve Claude de Cardaillac, qui sont présentes sur la dernière litre de la chapelle. Elle mourut le 29 août 1649 et fut enterrée en grande pompes dans l’église des Augustins de Toulouse. Seuls son cœur et ses entrailles furent enterrés au pied de l’autel de l’église de Saint-Jory.
Issue d’une grande famille de l’aristocratie quercynoise, Claude semble avoir été une femme de caractère, prompte à défendre ses droits féodaux face à la communauté et aux consuls de Saint-Jory comme face à sa propre famille et ses enfants en particulier. Elle survécut à son mari et à son fils ainé Jean-François, Conseiller au Parlement, qui mourut en 1645.
La forme de l’écu en losange est propre aux armes féminines à cette époque. L’association des armes du mari et du père dans un mi-parti es aussi très habituelle dans l’héraldique aristocratique depuis la fin du Moyen-Âge. Les cinq écus peints présentent donc un « mi-parti d’azur à deux fasces d’or accompagnées de six besants d’argent (qui est Du Faur) et de gueules au lion d’argent à l’orle de treize besants du même (qui est de Cardaillac) ».
C’est le fils cadet de Jacques II et de Claude de Cardaillac, le Capitoul Jacques III Du Faur de Saint-Jory qui est représenté dans les « Annales de la Ville de Toulouse » pour l’année 1653-1654. On reconnaît à ses pieds l’écu aux armes des Du Faur.
Il semble que la génération suivante ait apporté des changements à l’antique blason des Du Faur.
Tristan Du Faur de Cardaillac-Bioule, fils aîné de Jean-François et de Margueritte de Bertrand, hérita de son grand-oncle Hector de Cardaillac les titres de marquis de Cardaillac et comte de Bioule en août 1650. Ainsi, le modeste baron de Saint-Jory se voyait propulsé à un rang bien plus haut de l’aristocratie. Ses armoiries, enregistrées dans l’Armorial Général de France (AGF, vol. XIV Languedoc 1, p.1119) présentent donc un écartelé où figurent les armes prestigieuses des Cardaillac-Bioule dont Tristan avait aussi hérité.
Est-ce à l’occasion de cette écartelure que Tristan modifia aussi la position des besants d’argent dans l’écu Du Faur ou bien pour se différencier des autres branches de ce lignage ? Nous ne le savons pas, mais ses cousins de la branche Du Faur de Pibrac continuèrent eux à porter les armes pleines du la famille.
Les armes brisées de la branche de Saint-Jory furent dorénavant « d’azur à deux fasces d’or accompagnées de six besants d’argent posés 3, 2 et 1 ».
Ce personnage épousa en 1656 Catherine de Cheverry. Il eurent un fils unique, Jacques-Louis, qui naquit en 1659.
Ce sont les armes de cet homme, Jacques-Louis Du Faur de Saint-Jory de Cardaillac de Bioule qui apparaissent aussi dans l’Armorial Général (AGF, vol. XIV Languedoc 1, p.5). Comme celles de son père, elles présentent un écartelé des deux armoiries des Du Faur avec brisure et de Cardaillac-Bioule.
Enfin, nous trouvons dans le même volume les armoiries de Thérèse Du Faur de Saint-Jory (AGF, vol.XIV Languedoc 1, p.439), une des sept filles que Jacques III Du Faur (le capitoul de 1654 rencontré plus haut) eut de Françoise de Parade. Cet écu est intéressant puisqu’il montre que Thérèse portait comme son cousin les armes brisées aux besants posés 3 2 et 1 alors que son père est représenté avec les armes traditionnelles du lignage dans les Annales de Toulouse (voir au-dessus). Cela nous invite à penser que la brisure de la branche Du Faur de Saint-Jory n’intervint qu’à la génération de Tristan Du Faur (1630-1701) et de sa cousine germaine Thérèse. Cela semble renforcer l’hypothèse d’une brisure tardive (quatre générations après la séparation des branches de Pibrac et de Saint-Jory), peut-être motivée par l’enregistrement dans l’armorial général du royaume constitué par Charles d’Hozier à la demande du roi Louis XIV.
Les parts de seigneurie (les 3/8) de la branche secondaire de Jacques III Du Faur passèrent dans la maison des comtes de Foix. La branche aînée des Du Faur de Saint-Jory conserva la majeure partie de la seigneurie (les 5/8) jusqu’à la Révolution Française. En 1790, Marie-Gabrielle Du Faur, petite-fille de Jacques-Louis Du Faur et dernière représentante de cette branche de la famille mourut à l’âge de 78 ans. Ses biens nobles furent confisqués aux enfants qu’elle avait eus de Paul-Antoine Alies, baron de Bazian (32), de Caussade (82) et de Réalville (82), président de la Cours des Aides de Montauban.
Avant de quitter l’église Notre-Dame, nous signalerons la présence sur un pilier extérieur du bâtiment, du côté du cimetière, d’une plaque armoriée dont le chanoine Jean Contrasty a donné une reproduction fidèle qui permet de distinguer des détails difficiles à observer dans la réalité9.
Cet écu dont la forme indique bien une facture des 16e ou 17e siècles, porte un « écartelé aux 1 et 4 de … à la croix alésée de … chargée d’un besant/tourteaux de … et aux 2 et 3 de … au lambel de trois pendants de … ». Par chance, il est accompagné d’une légende gravée au nom du commanditaire « PIERRE BENOIST – RECTUR ». Nous savons donc qu’il s’agit des armoiries d’un curé de Saint-Jory. Ce prêtre est attesté entre 1505 et 1546 comme desservant l’église de Saint-Jory et paraît avoir été un acteur principal de la reconstruction de l’édifice. Un de ses probables parents, Pierre Benoist est déjà mentionné comme curé de Saint-Jory dans un acte de 152710.
Le patronyme assez répandu de Benoist invitait à la prudence. Nos recherches nous ont cependant mené rapidement à une famille capitulaire toulousaine implantée à seulement un kilomètre au sud-est du village de Saint-Jory, au château de Novital. En effet, ce petit château était le siège d’une seigneurie indépendante dont le mandement fut intégré aux communes voisines de Lespinasses et Saint-Jory en 1846. Contrasty y consacra un appendice à son histoire de Saint-Jory. Nous y apprenons qu’il appartint successivement aux familles de Racaud (14e-15e siècles), de Puybusque (de 1432 à 1530), de Tournemire (1530-1576) et de Clairac (1576-1595)11.
Une lacune de 50 ans dans la suite des seigneurs du lieu nous amène jusqu’à 1646 où nous trouvons le premier Benoist, seigneur de Novital. Déjà en 1535, un Charles Benoist, seigneur de Cépet (31) était capitoul du quartier Saint-Barthélémy de Toulouse12. Il apparaît dans les Annales de la ville. Mais ici, il semble bien que l’ordre des noms inscrits et des portraits des capitouls soit différent de l’ordre des armoiries peintes au-dessus. En effet, le nom de Charles Benoist est écrit en première position mais c’est bien le second écu qui correspond exactement aux armes contemporaines représentées sur le pilier de l’église Notre-Dame de Saint-Jory13. Elles peuvent être blasonnées : « écartelé aux 1 et 4 de gueules à la croix alésée d’or et aux 2 et 3 de gueules au lambel de trois pendants d’or ». Seule différence à remarquer, l’absence du meuble chargeant la croix. Cependant, la ressemblance des deux compositions héraldiques ne laisse que peu de doutes sur cette identification.
Le fait que le premier écu de la miniature porte également un écartelé avec une croix alésée d’or sur champ de gueules n’exclut pas cependant un lien éventuel avec notre lignage. En fait, nous proposons l’hypothèse de voir dans le capitoul Bérail Bénézet dont le nom apparaît en dernière position sur la miniature, un parent des Benoist, d’un rameau qui n’aurait simplement pas choisi de franciser son patronyme. La confusion dans les noms et les armoiries présents dans cette miniature mériterait une étude plus approfondie pour démêler tout cela14. La croix, peut-être allusive15, nous semble cependant pouvoir constituer l’élément premier des armes originelles de la famille de Benoist/Bénézet.
Un siècle plus tard en 1646, Bernard de Benoist, docteur, avocat en parlement et seigneur de Novital, accéda au capitoulat de La Dalbade. L’enluminure des Annales pour cette année-là a disparut. Heureusement, nous trouvons les armoiries de ce personnage sur le frontispice des « Obros de Goudelin » publiées à Toulouse en 164616.
Nous y retrouvons la croix non alésée mais chargée d’une coquille qui pourrait avoir un rapport avec le tourteau ou besant ébauché sur la gravure de l’ouvrage du chanoine Contrasty. Les hachures horizontales devraient évoquer un champ d’azur, donc différent du gueules rencontré précédemment. Cependant, d’autres armoiries présentes sur ce frontispice montrent que le graveur n’a pas respecté ce code moderne de représentation des émaux17. Ainsi, nous proposons de blasonner l’écu : « de gueules à la croix d’or chargée d’une coquille de … ».
La famille de Benoist demeura à la tête du domaine de Novital jusqu’en 1737 quand Gui-Bernard de Benoist et sa mère Anne de Saint-Orens, veuve de Pierre-Jean de Benoist, le vendirent à l’avocat Antoine Delherm pour 33 500 livres.
Pour terminer, nous dirons quelques mots des armes municipales de Saint-Jory qui figurent sur la façade de la mairie et qui peuvent se blasonner : « d’or au croissant de sinople ». Comme souvent pour l’héraldique municipale de cette région, ces armoiries furent imposées à la communauté en 1698 par le pouvoir royal, représenté par le conseiller et juge d’armes royal Charles d’Hozier. En effet, la majeure partie des communautés villageoises n’avait pas d’armoiries et, pour les soumettre à l’impôt créé par le roi Louis XIV, elles se virent affublées d’armoiries données d’office et attribuées au hasard dans des batteries d’armoiries stéréotypées.
Plus récemment, la commune de Saint-Jory a adopté un logo d’inspiration héraldique qui utilise une association de ce croissant et de l’image de la croix occitane, comme on peut le voir sur les plaques de rues du village.
Olivier Daillut-Calvignac
Bibliographie : J.CONTRASTY, « Histoire de Saint-Jory », Tolosa, 1922 ; R.BOURSE e I.DUFIS, « Armorial des Capitouls », 2008 ; C.CAU, « Les Capitouls de Toulouse », Tolosa, 1990 ; Armorial Général d’Hozier vol.XIV, Languedoc I, e vol.XV Languedoc II ; M.de BATZ e J.-P. SUZZONI, « Le château de Montlaur. », in l’Auta n°502, 1985 ; H.de BARRAU, « Documens historiques et généalogiques sur les familles et les hommes remarquables du Rouergue, dans les temps anciens et modernes », T.3, 1857 ; M. de BONALD, « Documents généalogiques sur des familles du Rouergue », 1902 ; O.de DAINVILLE, Sceaux conservés dans les archives de la ville de Montpellier, 1952.
Sauf mention contraire, toutes les photos sont de l’auteur.
- J.CONTRASTY, « Histoire de Saint-Jory », Tolosa, 1922. Cet ouvrage a representé la source principale pour la redaction de cet article.
- C.CAU, « Les Capitouls de Toulouse », Tolosa, 1990, une partie de ces miniatures est consultable sur https://www.archives.toulouse.fr/archives-en-ligne/consultez-les-archives-numerisees/les-enluminures-des-annales
- Contrasty, op. cit. p.73.
- M.de BATZ e J.-P. SUZZONI, « Le château de Montlaur. », in l’Auta n°502, 1985.
- M. Oudot de Dainville, Sceaux conservés dans les archives de la ville de Montpellier, 1952, p.218
- MS M717 f°1r – visible sur https://www.themorgan.org/manuscript/128485
- Contrasty nous apprend que les membres de la famille de Mauriac vendirent peu à peu toutes leurs parts de Saint-Jory aux Du Faur entre 1557 et 1560
- (voir notre article…)
- Une autre plaque armoriée de mêmes dimenssions est également visible du côté sud du pilier mais l’écu et l’inscription y sont effacés, probablement depuis la Révolution française. Nous ne pouvons pas dire s’il présentait la même gravure ou pas.
- Contrasty, op. cit. p.148.
- Contrasty, op. cit. p.295.
- Un autre membre de cette famille à occuper un siège de capitoul en 1534 fut Nicolas Benoist, docteur et seigneur de Pechbonieu (31). Voir Lafaille, Annales de la ville de Toulouse, T.2, 1701, p.94 ainsi que Abel & Froidefond, Tableau chronologique des capitouls de Toulouse, 1786, p.98.
- Cette constatation remet du coup en question les identifications héraldiques des capitouls de l’année 1535-1536 proposées par Cau, Bourse et Dufis.
- Pour l’instant et dans l’état de nos connaissances, seuls les écus n°4 et 5 de la miniature (Jean Cheverry et Pierre Salamon) son connus par d’autres sources authentiques et apparaissent bien positionnées par rapport aux noms écrits au-dessous des personnages.
- Le patronyme occitan Beneset, orthographié quelquefois Bénézet/Benezit pourrait appeler une allusion à la croix bénite. un autre lignage toulousain homonyme portait dans ses armoiries une main bénissante allusive (Bourse-Dufis, op.cité n°113.
- Ces armoiries sont présentées par Bourse et Dufis dans le supplément à leur « Armorial des capitouls » comme un alias à d’armoiries « de sable à l’ancre d’or accompagnée de deux étoiles d’argent ». Ces dernières doivent cependant être considérées comme erronées puisque ce sont celles d’une autre famille de Benoist, seigneurs de La Garde et Marignac, originaire de Montauban et installée en Rouergue (Barrau, Documens… T.3, p.140 ; Bonald, Documents généalogiques …, 1902, p.68 e AGF vol.XV, Languedoc II, p.1464).
- En effet, le gueules y est représenté en blanc comme l’argent dans les armoiries de la ville de Toulouse, l’or n’y est pas pointillé, les chefs de gueules présents dans les armes de Jean de Catelan ou de Pierre Souterenne sont aussi rayés horizontalement comme s’ils étaient d’azur. Voir à propos des armoiries de Bernard de Benoist, l’Armorial des Capitouls de R.Bourse et I.Dufis que nous ne suivons donc pas pour le blasonnement d’azur à une croix d’argent chargée d’une coquille de gueules » (n°115 bis).